Caractère unitaire du modèle communautaire

Le caractère unitaire du modèle communautaire vient de trouver une belle illustration à propos d’un dépôt de modèle communautaire portant sur trois canettes

24 septembre 2004 : enregistrement du modèle communautaire sur la base de deux priorités allemandes des 27 mArs et 27 avril 2004 pour des « canettes # :

14 février 2011 :  C………. demande la nullité du modèle au regard de différentes canettes antérieures :

8 juin 2012 : rejet de la demande d’annulation par la division d’annulation de l’Office européen

8 septembre 2014 : la chambre de recours de l’EUIPO annule la décision de la division d’annulation et annule le modèle.

L’affaire vient devant le Tribunal de l’Union européenne qui a rendu son arrêt le 13 juin 2017. L’arrêt est

A l’appui de son pourvoi, le titulaire du modèle conteste l’appréciation du périmètre du modèle, puisque l’Office l’a finalement annulé en considérant qu’il s’agissait de canettes usuelles.

  • Que veut dire une contenance usuelle puis-qu’aucune contenance n’était indiquée au modèle?

Cette question est traitée ici au regard de la motivation suffisante de la décisions de Chambre de recours.

En l’espèce, au point 34 de la décision attaquée, dans le contexte de l’appréciation de l’impression globale produite par le dessin ou modèle contesté sur l’utilisateur averti au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 6/2002, la chambre de recours a indiqué ce qui suit :

« Les différences de proportions invoquées par la titulaire ne sont pas perceptibles. Le rapport de la hauteur à la largeur s’avère à peu près identique dans les dessins ou modèles à comparer. Même si l’utilisateur averti percevait des différences dans les proportions, elles seraient sans conséquences sur l’impression globale. Même la représentation du [dessin ou modèle] contesté en trois tailles différentes ne motive pas une différence pertinente. L’utilisateur averti connaît les contenances usuelles pour des canettes pour boissons et n’attache pas d’importance aux différences de tailles s’y rapportant dans l’impression globale. »

29      Les considérations apportées à la dernière phrase du point 34 de la décision attaquée et lues aussi dans le contexte de cette décision ne sont pas entachées d’un vice de motivation.

30      En effet, au point 25 de la décision attaquée, la chambre de recours a défini l’utilisateur averti comme étant la personne, dans l’industrie des boissons, qui était chargée d’embouteiller les boissons et qui s’informait des offres pertinentes au moyen notamment de revues spécialisées.

31      Au point 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que la contenance des canettes pour boissons ne dépassait normalement pas les 500 ml, que cette contenance correspondait aux quantités usuelles utilisées dans le commerce pour la vente de boissons et que ladite contenance affectait la taille des canettes.

32      Enfin, au point 37 de la décision attaquée, la chambre de recours a précisé que ni les dimensions concrètes ni la contenance ne se déduisaient du dessin ou modèle contesté et que, pour l’appréciation du caractère individuel, seule était pertinente l’impression globale produite par les dessins ou modèles à comparer.

33      Compte tenu, premièrement, du constat de la standardisation en ce qui concerne la contenance des canettes pour boissons, deuxièmement, de l’énonciation du fait que la contenance affecte la taille des canettes, troisièmement, de l’énonciation du fait que l’utilisateur averti en l’espèce a été défini comme étant l’embouteilleur et, quatrièmement, des constatations selon lesquelles ni les dimensions concrètes ni la contenance ne se déduisent du dessin ou modèle contesté et selon lesquelles seule l’impression globale est pertinente, l’affirmation de la chambre de recours figurant dans la dernière phrase du point 34 de la décision attaquée, selon laquelle l’utilisateur averti connaît les contenances usuelles des canettes pour boissons et n’attache pas d’importance aux différences de tailles s’y rapportant dans l’impression globale, est motivée à suffisance de droit.

  • S’agit-il de trois canettes ou d’un groupe de trois canettes ?

Comme les dispositions sur le modèle communautaire exigent un caractère unitaire, cette condition serait remplie si l’utilisateur y voit un seul objet, mais ce modèle ressemble à s’y méprendre à trois canettes.

 Sur la première branche du moyen tirée de l’appréciation erronée de l’étendue de la protection conférée au dessin ou modèle contesté

41      Il convient de rappeler que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a défini, à titre liminaire, l’objet de la protection du dessin ou modèle contesté. Dans ce contexte, elle a précisé que, en vertu de l’article 3, sous a), du règlement n° 6/2002, l’objet d’un dessin ou modèle ne pouvait être qu’un objet unitaire et que la combinaison de plusieurs produits non associés entre eux ne pouvait être appréciée comme un article qu’à la condition que ces produits soient esthétiquement assortis, présentent un rapport fonctionnel et soient habituellement commercialisés comme un produit unitaire. Elle a fourni comme exemple celui des couverts de table composés d’un couteau, d’une fourchette et d’une cuillère et celui d’un ensemble composé d’un échiquier et de pièces d’échec.

42      La chambre de recours a considéré que, en l’espèce, le dessin ou modèle contesté ne remplissait pas ces conditions et ne pouvait pas être considéré comme un objet unitaire sous la forme d’un groupe de trois canettes, mais que, aux fins de l’appréciation de la nouveauté et du caractère individuel de celui-ci, il fallait prendre pour base l’apparence de la canette individuelle représentée dans trois tailles différentes.

Dans le cadre du deuxième grief soulevé par la requérante, il appartient d’apprécier le bien-fondé du refus de la chambre de recours de définir le dessin ou modèle contesté en tant que groupe de canettes ou, en d’autres termes, de percevoir les trois canettes de tailles différentes représentées dans le dessin ou modèle contesté en tant qu’objet unitaire.

… L’intérêt que représente pour la requérante la définition du dessin ou modèle contesté en tant que groupe de canettes consiste dans le fait que les dessins ou modèles antérieurs invoqués par l’intervenante ne représentaient pas des groupes de canettes mais une seule canette. Dès lors, la définition du dessin ou modèle contesté en tant que groupe de canettes constituerait un élément de différenciation de celui-ci par rapport aux dessins ou modèles antérieurs, ainsi que, au demeurant, la division d’annulation l’avait évoqué au point 17 de sa décision du 8 juin 2012.

60      Ainsi que la chambre de recours le note à juste titre, au point 18 de la décision attaquée, l’objet d’un dessin ou modèle ne peut être qu’un objet unitaire, l’article 3, sous a), du règlement n° 6/2002 évoquant expressément l’apparence « d’un produit ». Par ailleurs, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours précise, au point 18 de la décision attaquée, qu’un ensemble d’articles peut constituer « un produit » au sens de la disposition susvisée s’ils sont esthétiquement assortis, présentent un rapport fonctionnel et sont habituellement commercialisés comme un produit unitaire.

   En partant de ces prémisses qui, au demeurant, ne sont pas contestées par les parties, la chambre de recours a conclu, au point 19 de la décision attaquée, que le dessin ou modèle contesté ne remplissait pas les trois conditions présentées au point 60 ci-dessus et que, par conséquent, il ne pouvait pas être perçu comme un objet unitaire. Selon elle, lorsque des ensembles de canettes pour boissons sont proposés, il s’agit toujours de canettes de même taille, ce qui se comprend, notamment, compte tenu du transport et du stockage.

62      La conclusion de la chambre de recours relative à l’absence, en l’espèce, d’un objet unitaire n’est pas non plus entachée d’erreur.

… le recours contre la décision d’annulation est rejetée