Le patrimoine commun de la nation voit en théorie année après année son périmètre s’élargir.

  • les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sons et odeurs qui les caractérisent,
  • les sites,
  • les paysages diurnes et nocturnes,
  • la qualité de l’air,
  • les êtres vivants,
  • et la biodiversité.

Les sons et les odeurs ajoutés par la loi du 29 janvier 2021, la loi, ne sont pas à prendre à la légère.

« Chant du coq, tintement des cloches, braiement de l’âne, odeur du fumier ou des poulaillers, coassements de batraciens : autant de bruits et d’effluves qui font partie intégrante de la vie rurale », tels étaient ceux annoncés en introduction à la proposition de loi visant à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises ;

Initialement la proposition de loi visait à créer un patrimoine sensoriel et à y inscrire « les émissions sonores et olfactives des espèces et milieux naturels terrestres et marins, des sites, aménagés ou non, ainsi que des êtres vivants qui présentent au regard de la ruralité un intérêt suffisant pour en rendre désirable la préservation peuvent à tout moment faire l’objet d’une inscription au titre du patrimoine sensoriel des campagnes. »

Cette définition comme l’avait rappelé le conseil d’État dans son avis de janvier 2020 par son étendue illimitée incluait nombre de phénomènes naturels d’une part, et reposait sur des caractérisations éminemment subjectives d’autre part.

S’agissant des phénomènes naturels « les bruits du vent et de la mer, les cris des animaux autres que ceux d’élevage, les odeurs de la végétation naturelle » , cet avis soulignait que leur rattacher des effets de droit était très délicat puisque personne n’en est responsable.

Pour le Conseil d’Etat, cette impossibilité de rattachement à des pratiques humaines, – le fait  de l’homme  qui conditionne la notion de patrimoine culturel immatériel -,  a conduit à l’abandon de la modification envisagée initialement au Code du patrimoine. Néanmoins la proposition de loi se référait expressément à la définition en droit français du patrimoine immatériel et à celle posée par l’Unesco.

Mais revenons à la proposition de loi qui n’envisageait la création de ce patrimoine sensoriel que pour lui éviter de tomber sous le coup d’actions en justice pour trouble anormal  de voisinage sous réserve de bénéficier d’une inscription préalable à l’inventaire général du patrimoine culturel.

Or, quittant le Code du patrimoine pour se glisser dans le Code de l’environnement (article L110-1 ) , les sons et les odeurs n’ont-ils pas soumis à la condition préalable d’inscription à cet inventaire culturel tous les éléments qui jusqu’ici étaient intégrés d’office par leur nature au patrimoine commun de la nation ?