L’arrêt du 28 juin 2017 du Tribunal de l’Union européenne rappelle qu’une forme géométrique simple n’a pas de caractère distinctif au sens du droit des marques de l’Union européenne. L’arrêt est là.

Le signe dont l’enregistrement a été refusé par l’EUIPO :

Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé :

« ..matériel de premiers soins (classe 5), de téléphones portables et d’appareils de communication, y compris certains accessoires, de sacoches pour ordinateur, de vêtements de protection, de matériel de sauvetage (classe 9), de matériel médical de secours professionnel (classe 10), d’appareils d’éclairage (classe 11), de sacoches de bicyclettes (classe 12), de malles, de mallettes et de sacs pour la vie courante, le voyage et le sport (classe 18), de liens de divers types et de matériels pour la manutention, le transport ou l’emballage, de matériaux pour la filtration ou le rembourrage (classe 22), de vêtements lato sensu (classe 25) et d’accessoires techniques pour vêtements (classe 26). »

La demande d’enregistrement a été rejetée pour défaut de caractère distinctif.

  • Ce que voit le déposant dans ce signe : un triangle avec une tension graphique

À cet égard, la requérante soutient que, si, certes, la forme de base du signe en cause est un triangle, cette forme se distingue d’emblée d’un simple triangle. En effet, la représentation spécifique de ce triangle créerait une « tension graphique » sur laquelle buterait l’observateur.

19      Cette tension résulterait de l’épaisseur latérale du triangle représenté, importante au point de constituer un cadre clairement visible, et d’épaisseur variable, le côté droit étant environ deux fois plus large que le côté gauche. La requérante souligne que, du fait de cette différence d’épaisseur, le triangle noir, extérieur, et le triangle blanc, intérieur, ont des axes différents. En outre, ladite tension serait renforcée par un jeu de l’esprit, car il pourrait être vu alternativement, dans le signe en cause, soit un triangle noir aux bords épais, soit un triangle blanc à plat.

20      La tension ainsi créée et renforcée par les particularités du signe en cause inciterait l’observateur à réexaminer ce signe, ce qui conférerait à ce dernier une impression globale caractéristique. Ainsi, lesdites particularités ne pourraient pas être assimilées à une simple conception enjolivée d’un triangle, qui se confondrait avec la forme de base.

  • Pour le Tribunal

  À titre liminaire, il y a lieu de constater que, du fait de sa composition, le signe en cause peut être objectivement décrit de deux manières différentes. En effet, ainsi qu’il résulte de la décision attaquée, ce signe peut être décrit soit comme la combinaison de deux triangles, à savoir un triangle isocèle noir dans lequel se trouve un triangle isocèle blanc légèrement déplacé vers la gauche, soit comme un triangle isocèle noir dont l’intérieur est vide. Ainsi qu’il est précisé dans la décision attaquée, cette seconde description correspond à celle donnée par l’examinateur, à savoir un triangle isocèle qui diffère d’un triangle habituel par l’épaisseur irrégulière de ses côtés.

28      Or, ainsi que la chambre de recours l’a correctement énoncé, le signe en cause est composé d’éléments simples qui, pris isolément, sont dépourvus de caractère distinctif et ce signe, dans sa configuration concrète, ne contient pas de caractéristiques telles qu’il retienne l’attention du consommateur en permettant à ce dernier de s’en souvenir en tant qu’indicateur d’origine commerciale.

29      En effet, concrètement, l’unique particularité graphique du triangle isocèle qui constitue la forme de base du signe en cause consiste dans le fait que ce triangle comporte des côtés de couleur noire dont l’épaisseur, relativement importante, varie, puisque celle du côté droit est approximativement double par rapport à celle de chacun des deux autres côtés.

30      Or, en tant que le signe en cause est constitué au départ d’une forme triangulaire, il y a lieu de constater qu’une telle forme est une figure géométrique de base qui, conformément à la jurisprudence citée au point 23 ci-dessus, n’est pas susceptible, en tant que telle, de remplir une fonction d’identification de l’origine commerciale.

Or, en l’espèce, il y a lieu de constater, à l’instar de la chambre de recours, que, s’il est possible de considérer le signe en cause comme une figure composée de deux triangles, cette figure ne procède d’aucune combinaison particulière, mais constitue exactement la somme des deux éléments qui la composent, dès lors que la vision d’un second triangle, de couleur blanche, découle directement de la représentation du premier triangle sous la forme d’un cadre noir.

34      Certes, la requérante souligne le désaxement de ce second triangle par rapport à celui qui constitue la forme de base du signe en cause, mais tant l’existence d’un triangle intérieur que son désaxement par rapport au triangle extérieur sont de simples conséquences de l’unique particularité graphique relevée au point 29 ci-dessus.

35      D’une part, le fait même qu’un triangle soit délimité dans l’espace sous la forme d’un cadre implique nécessairement la présence d’une seconde figure géométrique semblable, à plat et d’une autre couleur ou nuance de couleur, constituant l’intérieur de ce cadre.

36      Or, dès lors que la circonstance qu’une figure géométrique simple soit représentée sous la forme d’un cadre n’est pas de nature à conférer un caractère distinctif à un signe composé d’une telle figure, un résultat différent ne saurait découler de la présence d’éléments qui sont consubstantiels à ce cadre, à savoir l’intérieur de celui-ci et l’existence d’une différence chromatique.

Le recours contre la décision de rejet de l’Office européen des marques est rejeté.