La  mise en œuvre de la Juridiction Unifiée du Brevet débutera par une période dite transitoire quant à sa compétence.

Cette période transitoire n’est pas à confondre avec la période dite de Sunsrise qui précédera de trois mois le début d’activité prévue au 1er juin 2023 de la Juridiction Unifiée du Brevet. Si dès la période de Sunrise, et même avant pour l’avocat, la question de l’opt-out s’est posée, sa réponse devra intervenir pendant la période transitoire.

1°) Pendant la période transitoire, une situation de concurrence des compétences entre la Juridiction Unifiée du Brevet et les juridictions nationales à apprécier par l’avocat pour l’action en nullité ou en contrefaçon

Concurremment avec la compétence exclusive de la Juridiction Unifiée du Brevet, pendant la période transitoire,  pour l’avocat, il sera toujours possible d’engager une action en contrefaçon ou en nullité d’un brevet européen ou d’un certificat complémentaire de protection sur la base d’un brevet européen devant les juridictions ou autorités nationales qui jusqu’ici étaient les seules compétentes.  

Cependant pendant cette période transitoire, le titulaire d’une demande de brevet européen ou d’un brevet européen délivré ou échu pourra renoncer à la compétence exclusive de la Juridiction Unifiée du Brevet, c’est l’opt-out.

Sur le nombre théorique de titres concernés, quelques estimations.

En 2021, à l’Office Européen des Brevets ont été déposées 188 600 demandes de brevets, même si pour l’année 2017, il n’y a en avait eu que 166 594, cela donne une idée du nombre de demandes déposées dans les 10 dernières années, auquel sont à ajouter parmi les titres concernés les brevets délivrés, – 138 000 pour la seule année 2019 -, nombre qu’il faut multiplier par autant de pays où les parties nationales sont en vigueur. Sur les 25 États membres de l’Union européenne qui ont signé l’accord international sur la Juridiction Unifiée du Brevet, seuls 17 l’ont déjà ratifié, ce qui devrait à la marge minorer le nombre total de parties nationales de brevets européens (voir la première partie de l’article Brevetés, auteurs, illustrateurs et photographes : le vertige de l’opt-out).

Pendant la période transitoire, la compétence des actions en nullité et en contrefaçon sera répartie de la manière suivante.

      • Brevets unitaires: ces actions restent soumises à la compétence exclusive de la Juridiction Unifiée du Brevet.
      • Brevets européens en vigueur ou échus et leurs demandes publiées, et certificats complémentaires de protection basés sur un brevet européen.
        • Hors cas d’opt-out, ces actions seront portées devant la Juridiction Unifiée du Brevet ou  devant les juridictions et autorités nationales qui jusqu’ici étaient compétentes.
        • Cas d’opt-out : ces actions resteront de la seule compétence des juridictions et autorités nationales.

2°) La durée de la période transitoire pour 7 ans au minimum et 14 ans au maximun

La période dite transitoire a une durée initiale de sept ans à partir de la date d’entrée en vigueur de la Juridiction Unifiée du Brevet, éventuellement prolongeable une seule fois pour au maximum sept ans.

Au total et au maximum cette période transitoire pourrait donc durer 14 ans.

3°) Le choix pour l’avocat de la renonciation à la compétence exclusive de la Juridiction Unifiée du Brevet par l’opt-out

Pour l’avocat, se prononcer sur l’opportunité de l’opt-out ou la renonciation à la compétence exclusive de la Juridiction Unifiée du brevet pour une demande de brevet européen publiée, un brevet européen en vigueur ou échu, ou un certificat complémentaire basé sur un brevet européen, nécessite d’en mesurer les conditions.

      • Aucun opt-out ne peut être demandé si une action antérieure devant la Juridiction Unifiée du brevet a été engagée.
      • Aucun opt-out ne peut être demandé après qu’un retrait d’un précédent renoncement soit intervenu.
      • Aucun opt-out ne peut être demandé ni pour un brevet unitaire ni pour un certificat complémentaire de protection basé sur un brevet unitaire.
      • L’opt-out ne peut être demandé que pendant la période transitoire et au plus tard un mois avant la fin.
      • Si une demande de renonciation est faite pour une demande de brevet et que le brevet délivré est un brevet unitaire, la renonciation est réputée retirée.
      • Un certificat complémentaire de protection accordé sur la base d’un brevet qui a fait l’objet d’une renonciation, est également exclu de la compétence de la JUB.
      • Cette renonciation à la compétence exclusive de la Juridiction Unifiée du brevet vaut pour toutes les parties nationales du brevet européen délivré.
      • Si cette décision de renonciation appartient au titulaire, encore faut-il par avance l’identifier clairement et indiscutablement, situation sans doute complexe quand les parties nationales du brevet européen ont faire l’objet de démembrements entre plusieurs propriétaires ou encore que le contrat de licence ait pu accordé au licencié des prérogatives sur les actions ici en cause.

3°) Pour l’avocat, le choix de l’opt-out doit aussi tenir compte de la possibilité ou non de retirer cette renonciation (l’opt-in)

La possibilité de retirer cette renonciation (l’opt-in) à la compétence exclusive de la Juridiction Unifiée du Brevet est soumises également à des conditions.

      • Sauf si une action a été engagée devant une juridiction nationale. Le texte ne le dit pas mais il s’agit probablement que des seules actions en nullité ou en contrefaçon.
      • À tout moment, mais le texte ne précise pas expressément si ce retrait peut intervenir après la fin de la période transitoire.

Sur la situation des titres soumis à opt-out après la période transitoire  : Le brevet européen bloqué hors de la compétence de la Juridiction Unifiée du Brevet après la période transitoire de l’article 83 de l’AJUB.

Ces différents points permettront aux usagers des brevets de prendre position sur cette éventuelle renonciation à la compétence de la Juridiction unifiée du brevet et de voir déjà les nombreux avantages du brevet unitaire.