L’adage attribué à Henri Desbois, les idées sont par essence et par destination de libre parcours, est bien connu des étudiants, mais aujourd’hui, il dépasse son domaine originaire de la création littéraire. Les  juges l’appliquent largement même quand il n’est plus question de droit privatif comme dans cet arrêt du 22 juin 2017 de la Cour de cassation, l’arrêt,  qui casse un arrêt d’appel  ayant condamné pour parasitisme :

Vu l’article 1382, devenu 1240 du code civil, ensemble le principe de la liberté du commerce et de l’industrie ;

Attendu que pour condamner la société L ……  pour parasitisme, l’arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que celle-ci a poursuivi le concept créé par M. X… avec les dessins d’autres produits, en déclinant certains d’entre eux par l’adjonction du terme « Big », et déposé une marque semi-figurative « dinde turkey pavo » dans le style propre à M. X…, correspondant à la déclinaison trilingue mise en place par ce dernier, qu’elle s’est approprié une façon innovante de représenter sur une bouteille de vin un dessin décoratif suggérant de façon ludique l’association du breuvage à un plat et qu’elle a ainsi, en étendant ce concept, cherché à profiter sans bourse délier de son succès économique, à son seul avantage et au mépris des intérêts de M. X… ;

Qu’en statuant ainsi, alors que, les idées étant de libre parcours, le seul fait de reprendre, en le déclinant, un concept mis en oeuvre par un concurrent ne constitue pas un acte de parasitisme, la cour d’appel a violé les texte et principe susvisés ;

Cet adage se retrouve aux décisions  de la Cour de cassation depuis une dizaine d’années.

  • Tout d’abord sans être repris comme motif de cassation

Au moyen d’un pourvoi qui sera rejeté contre un arrêt qui avait prononcé des relaxes sur des poursuites en contrefaçon de propriété littéraires et artistiques des calendriers des matchs de football de 1ère et de 2ème divisons, le 2 juin 1982. L’arrêt est là.

ALORS QUE SI LES IDEES SONT DE LIBRE PARCOURS, LA LOI PROTEGE LA FORME DANS LAQUELLE ELLES SONT EXPRIMEES, QUE LA CENTRALISATION D’INFORMATIONS SUR UN SUJET CONSTITUE UNE CREATION INTELLECTUELLE PAR L’ASSEMBLAGE REALISE ET DOIT ETRE PROTEGEE, D’OU IL SUIT QU’EN ADMETTANT L’EXISTENCE D’UNE OEUVRE DE RECAPITULATION SANS EN DEDUIRE QU’ELLE ETAIT PROTEGEE, LA COUR D’APPEL A VIOLE LES DISPOSITIONS SUSVISEES ET N’A PAS TIRE DE SES CONSTATATIONS LES CONSEQUENCES LEGALES QUI EN DECOULAIENT

Et toujours au moyen d’un pourvoi qui sera rejeté contre un arrêt qui a condamné pour contrefaçon d’une veste « que l’idée appartient au domaine public et est donc de libre parcours ; que, par suite, l’auteur d’une oeuvre n’est pas celui qui a fourni l’idée mais celui qui a donné forme à celle-ci ». 27 janvier 1998. L’arrêt de la Cour de cassation du 27 janvier 1998 est .

  • Sa présence aux arrêts de la Cour de cassation deviendra plus fréquente à partir de l’arrêt du 5 juillet 2006, qui sur la base de cet adage casse un arrêt d’appel  qui avait condamné pour contrefaçon de droits d’auteurs.

Vu les articles L. 111-1, L. 112-2, L. 122-4, L. 335-2 et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu qu’après avoir énoncé que, quand bien même les similitudes relevées correspondaient à un enchaînement de la vie courante ou d’éléments annexes qui s’imposaient par la nature du sujet traité, c’est-à-dire l’espionnage, il n’en demeurait pas moins que la création du personnage de celui qui se fait passer pour un espion pour séduire une femme est originale et que le scénario « Emilie » était une oeuvre marquée de la personnalité de l’auteur, l’arrêt attaqué relève qu’un tel personnage et les événements qui en découlent sont dans les deux scénarios le moteur de l’histoire, qu’il existe une ressemblance frappante et incontestable dans la composition des deux scénarios, ressemblance renforcée par les similitudes relevées ;

Qu’en se déterminant ainsi par voie de simple affirmation, alors que les idées étant de libre parcours il lui appartenait, après avoir procédé à une description fût-elle sommaire des deux scénarios en cause, de préciser, de façon concrète, quelles caractéristiques de forme originales dans la conception des deux oeuvres et de leurs personnages ainsi que dans le développement de l’action, étaient semblables, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

L’arrêt du 5 juillet 2006 est .

Rappelons que dans l’histoire moderne, le droit de l’auteur remonte à la  loi du 17 juillet 1793.

Art. 1er. Les auteurs d’écrits en tout genre, les compositeurs de musique, les peintres et dessinateurs qui feront graver des tableaux ou dessins, jouiront durant leur vie entière du droit exclusif de vendre, faire vendre, distribuer leurs ouvrages dans le territoire de la république et d’en céder la propriété en tout on en partie.